Comment le surmonter le deuil périnatal par Dr Eboulé

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Comment surmonter le deuil périnatal? 

 Parler des bébés morts, pendant la grossesse, pendant l’accouchement ou tout juste nés, n’est pas un sujet facile. Alors que le bébé occupe une place centrale dans la société, de façon paradoxale sa mort avant terme reste un sujet tabou. Si le deuil prend des aspects multiples, quel qu’en soit le sens spécifique, il recouvre toujours la notion de perte. Il concerne le temps de l’après mort de même que les attitudes à adoptées par les vivants afin d’accepter cette nouvelle réalité, la mort de l’autre. 

Étymologiquement, le mot deuil se rattache au latin « dolore », « souffrir » et au mot «duel». Du latin « Dolore », le mot deuil renvoie avant tout au mot douleur. Il désigne cette séparation, la perte d’un être cher. Cette perte et cette séparation vont entraîner une souffrance et un processus biopsychosocial de changement qui exige une adaptation. 

De ce fait, la mort périnatale est un phénomène d’actualité tant sur le plan mondial que national. Sur le plan mondial, les pertes périnatales sont chiffrées à près de 30%. Le Cameroun n’en est pas épargné. Au cours de l’année 1999, 70 décès sur 1000 naissances ont été enregistrés sur l’ensemble du territoire. Il est important de savoir distinguer les concepts de mort périnatale, mortalité périnatale, et deuil périnatal. 

La mort périnatale se définit, selon l’OMS comme « la perte survenant entre la 22e semaine d’aménorrhée (ou quand le fœtus a atteint un poids minimum de 500 grammes) et le 7e jour de vie ». Cependant, de nombreux spécialistes préfèrent élargir cette définition, en intégrant les pertes précoces, survenant plutôt dans la grossesse, au sens du chagrin et de la souffrance que peuvent endurer les mères.

La mortalité périnatale par contre représente le taux de décès d’enfants, morts entre la vingt-deuxième semaine de gestation et les sept premiers jours après l’accouchement, enregistré à un moment donné sur les plans local, national et international. 

Le deuil périnatal quant à lui, est défini comme un traitement intrapsychique consécutif à une perte périnatale. Ce traitement intrapsychique va s’articuler en trois temps : 

Le choc

Le choc concerne toute la personne de l’endeuillé. Les manifestations affectives, émotionnelles sont plus apparentes : les pleurs, les cris, les gémissements, mais elles peuvent être retardées ; alors l’endeuillé paraît surtout écrasé, anesthésié, anéanti, et sa douleur éclatera plus tard. Il faut aussi noter, chère Madame, que le  choc de la perte frappe également fortement le corps : la perte de l’appétit, du sommeil, de la sexualité et une immense fatigue sont habituels, et compréhensibles dans cette situation. Enfin, le choc se manifeste également dans les relations sociales et professionnelles. Pendant quelque temps, l’endeuillé assume avec difficulté ses responsabilités habituelles.

La période dépressive

Il s’agit ici, de la période centrale du deuil. C’est un authentique état dépressif réactionnel, avec sa douleur morale, sa difficulté à fonctionner sur le plan moteur comme sur le plan psychologique : l’attention et la mémoire vont mal et l’endeuillé s’en soucie, sommeil, appétit, sexualité et toujours une immense fatigue qui ne va pas céder de sitôt, et qui est, elle, angoissante. Tout  ce tableau frappe par son intensité et par sa durée si bien que l’entourage ne peut manquer de s’en rendre compte. 

La période de rétablissement ou période d’acceptation

A cette étape, la douleur s’apaise par moments, mais elle risque de revenir bientôt et elle reviendra de fait mais elle ne s’établira plus de manière durable. La difficulté à fonctionner demande davantage de temps pour se moraliser. Quant à la fatigue, elle sera la dernière à se dissiper, ce que les intéressés ont du mal à comprendre et à accepter. 

            Arrêtons-nous particulièrement sur le décès d’un enfant qui en sois est une expérience douloureuse pour les mamans. Il s’agit d’un deuil complexe et différent de tous les autres deuils à cause des multiples implications des mamans; entre autres parce qu’il survient à la suite d’événements heureux et que l’attachement s’est fait pendant la grossesse, qu’il y a peu de souvenirs rattachés à l’enfant et qu’il n’y a que peu de reconnaissance sociale de la perte. La fausse couche quant à elle, a ses propres spécificités. Pour la mère, la mort survient au sein de sa propre chair en transmission de vie. Elle ne donnera pas la vie, mais la mort. Malheureusement, s’ajoute le déni juridique de l’existence du bébé mort trop prématurément. La mort d’un adulte est la perte du passé tandis que la mort d’un bébé est la perte de l’avenir. Ce sont ces raisons qui expliquent pourquoi le deuil d’un enfant s’avère être un deuil singulier, particulier, avec une dimension culturelle bien particulière,  qui a un grand retentissement sur le couple, avec une douleur tout à fait particulière dont le vécu chez la femme est spécifique. 

         Pour surmonter cette douleur, dans un premier temps il est important pour la mère, d’être confrontée à la réalité de la perte car, ça aide à commencer le travail de deuil par l’acception progressive de la réalité qui est facilitée par la vue du corps ou des indices de la perte. Sans cette confrontation à la réalité, il y a risque d’un blocage du travail de deuil avec une évolution pathologique possible.  

Les mamans endeuillées peuvent aussi faire appel à des essais de restauration, de réparation, de compensation à savoir : l’engagement dans le travail, le spiritisme, des nouvelles créations, une présence cordiale des gens qui permet aux mamans endeuillées de retrouver leur équilibre, le besoin de parler  de l’enfant décédé, le besoin d’exprimer ses émotions, sa peine, qui favorise le mieux-être, et enfin le besoin de voir pour croire. Bien que nourrissant la spéculation que la perte n’est pas effective, la privation du corps de même que des indices ne représentent pas un facteur de complication du deuil périnatal. 

Dans ce même processus il est important pour les parents d’expliquer ou de raconter cette mésaventure car, il existe chez l’endeuillé, le besoin de parler  de l’enfant décédé, le besoin d’exprimer ses émotions, sa peine. Ceci a un effet cathartique, une sorte de purification de l’âme, qui favorise le mieux-être. La famille et le personnel médical ont donc majeur dans cette étape il faut donc: 

Evaluer la situation de la perte:

• explorer la signification de la perte pour la mère

• identifier les facteurs de risque d’un deuil compliqué 

Informer la mère endeuillée

  • Niveau médical (les causes du décès ; avec possibilité pour la mère de consulter le dossier médical de l’enfant décédé) ;
  • Niveau psychologique (expliquer les réactions de deuil, les différences de réactions hommes/femmes.  Adopter une présence bienveillante, une écoute attentive et une attitude empathique) ;
  • Niveau social (il est important d’aider l’endeuillé à renforcer ses liens avec l’entourage).

Favoriser les liens d’attachement avec l’enfant puis la séparation :

  • Favoriser le contact physique : encourager la mère qui fait face à un deuil périnatal à constituer des souvenirs tangibles (voir l’enfant si elle le souhaite, le porter, passer, lui donné une identité si possible, prendre des photos ou faire des vidéos, etc.)

Soutenir :

  • permettre l’expression des émotions 
  • favoriser un soutien social ;
  • améliorer le soutien à l’hôpital.

Par Dr   Eboulé Justin, psychologue spécialisé dans les traumatismes.

 Révisée Par Pamela Ndogno

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