On a tous écouté et réécouté ce titre de maître GIMS. Certains se sont reconnus dans les paroles sans pour autant comprendre à quel point le phénomène décrié était profond. A savoir celui de la parentification : en gros il s’agit d’un mécanisme par lequel les rôles sont inversés. L’enfant prend le rôle de parent et le parent celui de l’enfant.
L’histoire de Tomas Eboussi
« Mon père est parti quand j’avais 7 ans. Je ne l’ai plus jamais revu. Ma mère ne s’en est jamais remise. Elle était tout le temps triste et je suis devenu son confident. Je connaissais tous ses déboires avec mon père, les autres hommes qui la faisaient souffrir.
J’ai pris des cours de lutte dans le quartier pour pouvoir la protéger contre tous les hommes qui lui voulaient du mal.
Comme elle ne s’en sortait pas financièrement, j’ai commencé très tôt à l’âge de 12 ans à faire des petits boulots pour pouvoir subvenir aux besoins de ma petite sœur. Je manquais tout le temps les classes.
Ma mère me disait que j’étais l’homme de la maison, que je devais veiller sur ma petite sœur puisque mon père était parti. Je n’ai jamais eu d’adolescence, ni d’enfance. Pas le temps de jouer avec mes amis comme les autres car je devais gagner de l’argent.
Je me sentais coupable chaque fois que ma mère n’allait pas bien ou que ma petite sœur faisait une gaffe. Je me sentais responsable d’eux. Jusqu’à aujourd’hui ça continue. J’ai du mal à trouver une épouse. Car elle dénigre toutes les femmes que j’amène et je ne veux pas la blesser »
La parentification : l’enfant-confident, l’enfant- béquille, l’enfant aide-soignant
En Afrique, le phénomène de parentification est très visible mais masqué sous la cape d’éducation. Il suffit d’être doté d’une certaine prédisposition à la réussite que l’on devient « l’espoir de la famille « .
Ceci s’amplifie avec les événements de vie tels que le décès d’un parent, le divorce , les rites de succession. L’enfant porte ainsi une charge invisible et on s’interrogera très rarement sur les conséquences mentales que cela peut avoir sur les individus concernés.
S’en est une chose de confier de manière consciente et périodique à l’enfant des tâches qui lui permettront de devenir un adulte responsable et s’en est une autre de laisser reposer sur lui les tâches qui incombent aux parents.
L’enfant devient le protecteur du parent, lui assure la sécurité émotionnelle, physique et même matérielle. Le parent se sert de son enfant comme un exutoire sur qui il peut transférer toutes ses souffrances et ses rêves non-réalisés créant ainsi une relation de dépendance.
La parentification instrumentale et la parentification émotionnelle
On parle de parentification instrumentale lorsque l’enfant endosse toutes les responsabilités matérielles (payer les factures, s’occuper de ses petits-frères, travailler pour subvenir aux besoins de la famille rôle qui revient au parent) .
La parentification émotionnelle c’est lorsque l’enfant prend le rôle de confident ou de médiateur entre les deux parents. « Va dire à papa que » « va dire à maman que » « Ton père », « ta mère ».
Les conséquences de la parentification
Comme il a été mentionné plus haut, si la parentification est périodique, reconnue et que l’enfant est valorisé alors c’est une étape qui permettra à l’enfant de devenir un adulte responsable.
Elle devient destructrice lorsqu’elle n’est pas reconnue, s’étend sur une longue période et que l’enfant n’est pas valorisé.
Chez les adolescents
On remarquera les troubles scolaires (retard, absence, fatigue), la dépression à cause de tout le stress et le poids que l’enfant porte sur ses épaules. Certains enfants plongeront dans la drogue, l’alcool car l’enfant cherchera où évacuer tout le stress qu’il ressent.
Chez Léa c’était les troubles scolaires. « je devais aller travailler avant d’arriver aller à l’école ce qui faisait que je n’avais pas le temps d’étudier, ni de profiter de mon adolescence comme les autres. Je me sentais mise à l’écart et petit à petit j’ai sombré dans la dépression.
Personne ne me comprenait. Ma maman disait que « j’étais une idiote, qu’elle regrettait de m’avoir mis au monde, pourquoi je ne pouvais pas faire comme les autres filles qui trouvaient des hommes riches pour prendre soin de leurs familles . Rien de ce que je faisais n’était jamais suffisant. «
Quand j’ai atteint l’âge adulte, j’ai coupé complétement les ponts avec elle pendant 2 ans.
Chez les adultes
La parentification a des effets même sur les adultes. Une fois adulte, il y aura deux tendances :
- Soit la personne se sentira épuisée d’avoir autant donné et ne voudra plus se donner . Ce sera une personne très indépendante, qui aura du mal à compter sur les autres, voudra toujours tout faire toute seule. Souffrira d’un manque d’empathie, dictateur et très exigeant envers les autres;
- Soit il sera toujours en train de donner aux autres sans jamais penser à lui-même, à ses propres projets . Devenant ainsi un bouc émissaire utilisé par tous et inconscient de sa valeur personnelle. Sa propre famille et ses amis seront toujours en train de profiter de lui. A chaque fois qu’il essaiera de dire non , un simple « tu es chiche « , « tu ne penses qu’à toi’ lui fera changer d’avis.
Comment vaincre les effets de la parentification?
Si vous constatez que vous avez longtemps fait reposer votre rôle sur les épaules de votre enfant, il suffit de le décharger de toutes ces responsabilités. « Désormais c’est moi qui ferais, ce n’est pas à toi de le faire, je suis responsable de toi ».
Ces phrases le déchargent automatiquement. « Va jouer avec tes amis », « sors, ne te préoccupe pas de moi ».
Si l’enfant est déjà adulte, réunissez toute la famille et dites-le leur clairement. « Votre frère peut vous aider mais vous n’avez pas à le submerger de vos problèmes. Il a sa vie. C’est vrai qu’il s’est longtemps occupé de nous et vous devez lui être reconnaissant » .
- Arrêtez de lui confier vos problèmes personnels : ce qui se passe entre votre époux et vous ou votre compagnon n’a rien à voir avec lui donc laissez-le en dehors de tout ça ! S’il vous voit triste, dites-lui clairement qu’il n’ait pas à s’en faire que ce sont des problèmes d’adultes.
Avez-vous des questions et des commentaires ? N’hésitez pas à nous les poser.
Sources : cairn info – immigrechoisi.com
Article très intéressant.
Pour les solutions, il faudrait déjà que le parent soit conscient et admette qu’il s’est déchargé de ses rôle et responsabilités sur l’enfant, ce qui n’est pas gagné. Ensuite, il faudrait qu’il accepté de se passer de l’aide et de l’appui de l’enfant.: je ne suis pas sûre qu’il l’accepte, et encore moins qu’il s’en passe.
Sous d’autres cieux, on enverrait l’enfant et le parent chez le psychanalyste pour que chacun ressorte son ressenti et pour apprendre à rééquilibrer les choses, mais ça a un coût et ce n’est pas dans nos mœurs (le psy, c’est pour les fous, et je ne suis pas fou)
Les conseils de parentification sont très importants. Mais combien reconnaissent ce que les grand-frères ont fait dans les familles.
Effectivement! C’est pourquoi il est important de ne pas accabler le grand-frére de toutes les tâches qui incombent aux parents. Surtout aussi apprendre aux petits-frères que leur grand-frère ne leur doit rien et qu’ils doivent être reconnaissants.